jeudi 24 mai 2007

Une France féodale, où rien ne nous choque plus


D'après une dépêche d'AP



L'ancienne juge d'instruction Eva Joly, rendue célèbre par l'affaire Elf, publie vendredi "La force qui nous manque", un livre co-écrit avec la journaliste Judith Perrignon, récit où s'entremêlent vie intime, vie publique et réflexions sur la corruption, la pauvreté.


De l'affaire Elf à son départ de la magistrature en 2002, elle est devenue une icône du combat contre la corruption dont les effets ruinent les démocraties et enrichissent les prédateurs.

A 63 ans, Eva Joly partage sa vie entre la France et la Norvège où elle est conseillère du gouvernement pour la lutte contre la corruption et le blanchiment. Une expérience qui lui permet de porter un "double regard" que lui a donné cette "double culture", celle de l'idéal égalitaire de la Norvège et celle de la France féodale.


Elle s'étonne du peu de réactions sur la nomination à l'automne 2006, au poste de procureur général de la cour d'appel de Paris, du directeur de cabinet du garde des Sceaux, ancien conseiller à la Justice de Jacques Chirac. "Est-on sûr qu'il n'y a pas de liens qui vont influer sur les choix que ce magistrat fera?", glisse-t-elle à l'occasion d'un entretien avec l'Associated Press pour la sortie de son livre.

La démocratie se définit par des actes comme "la liberté de la presse ou l'indépendance de la Justice". En France, "une grande partie de la presse n'est pas libre, une grande partie de la justice n'est pas indépendante", dit-elle. Et, à destination du nouveau locataire de l'Elysée: "Ce n'est pas parce que vous invoquez Jaurès que vous êtes démocrate".


Dans son dernier opus, elle revient sur ces "invulnérables", ces tout-puissants de la finance ou de la politique, persuadés d'être intouchables. Les Tapie, Le Floch-Prigent, Léotard ou Tarallo pour lesquels "le grand édredon des élites françaises a amorti les coups".


Elle raconte avoir bâti, avec l'aide de son gouvernement, un réseau (le "Network") de procureurs, de juges, de policiers qui luttent contre la corruption afin de relier entre elles des énergies, "tisser une toile serrée, forger un bouclier".


A l'instar de ses ouvrages précédents, elle nous livre ses réflexions, toujours utiles à rappeler, sur les paradis fiscaux, le pillage de l'Afrique ou la justice française.



- Ed. Les Arènes (190 pages; 19,80 euros)






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