| François Bayrou « Sans équité, nous risquons tout simplement de saper gravement les fondements de notre "vivre ensemble". » | La réponse de François Bayrou, soutenu par l’UDF L’article XIII de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen énonce que, pour l’entretien de la force publique et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable et qu’elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés. Il s’agit d’un texte fondateur pour notre République, qui dit clairement que nous devons tous contribuer au fonctionnement de l’Etat et que la charge commune doit être justement répartie. Cette idée de justice fiscale est à la base de la mise en œuvre de l’impôt unique et progressif sur le revenu, parachevée en 1959. Une idée qui signifie que la progressivité a une fonction d’équité sociale permettant une redistribution entre les revenus des plus riches et des plus pauvres. Toutes les analyses démontrent d’ailleurs que la progressivité a permis de réduire considérablement les inégalités. Cette réalité de l’impôt sur le revenu ne doit jamais être perdue de vue lorsqu’on envisage de toucher aux taux marginaux, de créer des boucliers fiscaux susceptibles de multiplier les niches fiscales ou d’attenter au principe même de la justice fiscale qui fonde notre République, qui lui confère son équilibre démocratiquement consenti. Cette déclaration de principe vaut également pour l’impôt de solidarité sur la fortune, dont la portée symbolique ne saurait échapper à personne. Comment imaginer un instant que le patrimoine soit exempté de l’effort contributif commun, que les rentes de situation héréditaires soient mieux traitées que le travail ? L’impôt progressif, c’est une correction des inégalités de naissance qui procurent aux plus aisés les opportunités les plus grandes, à l’école et dans l’enseignement supérieur, et dans la vie professionnelle. C’est un moyen de l’égalité des chances tout aussi important que l’ambition d’offrir aux jeunes défavorisés la meilleure éducation scolaire et universitaire. Raison pour laquelle je propose que, dans l’immense effort que tous nos concitoyens devront fournir pour réduire la dette et les déficits publics, nous instaurions un plafonnement des niches fiscales. Et je dis pour les mêmes raisons qu’il faut que nous ayons le courage de réformer en profondeur l’ISF. La création d’un bouclier fiscal à 50 % est une mesure teintée d’hypocrisie et d’injustice car cela revient à exonérer du paiement de l’ISF les plus riches alors que les contribuables moins fortunés continueront à y être soumis. Je propose tout autre chose. Je souhaite mettre en place une imposition sur le patrimoine à base large (à l’exclusion de l’outil de travail et des œuvres d’art), à partir de 750 000 euros, mais à taux léger (un prélèvement autour de 1 pour 1000). Notre pays est confronté à un immense défi : il doit tout à la fois régler le problème de la dette et investir dans l’avenir, l’éducation, la recherche et l’innovation. Autant dire que les marges de manœuvre sont étroites et qu’elles commandent un effort équitable de l’ensemble de nos concitoyens. Sans cette équité qui est le préalable à toute modernisation, nous risquons tout simplement de saper gravement les fondements de notre « vivre ensemble ». Tous ceux qui évoquent imprudemment la baisse des impôts ou, à l’inverse, leur augmentation, devraient y réfléchir à deux fois. | Olivier Besancenot « L’impôt doit permettre le financement des services publics et sa progressivité de redistribuer les richesses. » | La réponse d’Olivier Besancenot, candidat soutenu par la Ligue communiste révolutionnaire Cela n’étonnera personne : je ne souscris pas à l’affirmation « le marché est facteur de progrès » que l’on trouve dans l’appel « Pourquoi nous consentons à l’impôt » ! En revanche, comme ses signataires, je pense effectivement que « les inégalités engendrées par le marché sont mortifères pour la démocratie », que l’impôt doit permettre le financement des services publics et que sa progressivité est un des facteurs permettant la redistribution des richesses que je défends. Depuis plus de vingt ans, les « réformes » fiscales entreprises par les gouvernements (de droite comme de gauche) ont ruiné la progressivité de l’impôt. Il faut donc la rétablir, à la fois en augmentant la progressivité de l’impôt sur le revenu et en supprimant les impôts non progressifs au profit de l’impôt sur le revenu et de la taxation des fortunes. Toute somme perçue, quelle que soit sa nature – revenus du capital, revenus fonciers, revenus du travail – doit être imposée de la même façon, ce qui implique de supprimer toute mesure atténuant la taxation des revenus, notamment ceux du capital. Il faut rétablir la progressivité du barème de l’impôt sur le revenu, en augmentant le nombre de tranches (jusqu’à 20), en augmentant le taux marginal (jusqu’à 80 %), les tranches étant plus étendues dans le bas des revenus et plus resserrées dans le haut de façon à taxer moins les bas revenus. L’imposition doit se faire par tête et non plus par foyer : les parts supplémentaires pour enfants à charge doivent être remplacées par une allocation égale pour tous. La progressivité des impôts est également mise à mal par le poids des impositions proportionnelles : la CSG a dépassé le rendement de l’impôt sur le revenu. Tout prélèvement – aujourd’hui proportionnel – assis sur les salaires (CSG, CRDS...) doit être remplacé par une imposition (ou une retenue) progressive sans plafonnement. Le taux de l’impôt sur les sociétés doit être rétabli à 50 % et la base d’imposition doit être l’excédent brut d’exploitation : chiffre d’affaires moins salaires et charges directement indispensable à la réalisation de l’objet social (exemple : le kérosène pour Air France). L’ISF doit devenir un impôt touchant les plus riches (les 10 % de la population qui détiennent 50 % du patrimoine national) et surtout le capital, en supprimant toutes les exonérations existantes et en intégrant l’outil professionnel dans l’assiette. Des droits de succession progressifs doivent aussi permettre une redistribution des richesses accumulées. Une fiscalité plus juste implique la suppression des impôts (proportionnels et non progressifs) frappant la consommation. Rappelons que la Révolution française a supprimé la gabelle ! La TVA doit donc être supprimée (sauf pour les produits de luxe ou les produits écologiquement dangereux). Compte tenu des masses financières en jeu (45 % du budget de l’Etat), cela ne peut se faire sur un seul exercice budgétaire. Il faut donc, dans un premier temps, la création d’un taux zéro sur les produits de première nécessité. La taxe sur les produits pétroliers (TIPP) doit être supprimée pour les salariés et appliquée aux plus gros pollueurs : les entreprises de transport notamment. Enfin, toujours dans le même souci de progressivité et de redistribution, les impôts locaux (comme d’ailleurs la redevance télévision) doivent être intégrés à l’impôt sur le revenu. | José Bové « Instaurer une taxation des transactions financières et supprimer la TVA pour les produits de première nécessité. » | La réponse de José Bové, candidat antilibéral La place du système fiscal et de l’impôt progressif reflète les objectifs que la collectivité s’est donnée en matière de répartition des richesses, de financements de biens publics et de satisfaction de besoins sociaux. En plus de la transparence, de l’intégrité et de la compétence des décideurs publics et du système fiscal, l’adhésion collective à l’impôt repose sur les objectifs sociaux qui sont poursuivis. Souhaitant un nouveau partage de la richesse nationale plus favorable à la rémunération du travail et réduisant fortement les inégalités économiques, nous faisons une place toute particulière à l’impôt progressif. Il n’y a pas de niveau de prélèvements obligatoires optimal sans un débat démocratique portant sur la définition et le niveau des besoins qui doivent être pris en charge collectivement et sur le réduction des inégalités que l’on souhaite atteindre. Il s’agit donc de savoir quels sont les moyens financiers qu’on retire directement à certaines personnes pour réduire quelles inégalités et financer quelles dépenses nécessaires à la société. Nos choix – redistribution générale des richesses, redéploiement des finances publiques et réforme fiscale orientée vers plus de justice sociale – nécessitent d’accroître la place des impôts progressifs et de stopper durablement l’alignement de la fiscalité des Etats « par le bas ». Dans un premier temps, nous proposons de réexaminer l’ensemble des dérogations fiscales (50 milliards d’euros), de mettre un terme à l’allègement de l’impôt sur le revenu en faveur des plus riches en supprimant le bouclier fiscal, et de refondre le barème en 10 tranches avec une remontée du taux marginal à 55 % (au lieu de 40). D’autre part, l’impôt sur les sociétés, devenu l’un des plus faibles d’Europe, pourrait être revalorisé par la suppression d’effets d’assiette (zones franches) et de régimes dérogatoires, en se tablant sur le bénéfice mondial consolidé. Nous souhaitons également le rendre plus progressif en imposant plus fortement les bénéfices distribués ou placés sur les marchés financiers que ceux consacrés à l’amélioration de l’outil de travail, la recherche, l’emploi ou les salaires. Nous proposons également d’élargir l’assiette des impôts sur la fortune et de procéder à une augmentation du taux pour les tranches supérieures. Enfin, nous proposons une annulation du relèvement du seuil d’imposition en matière de transmission du patrimoine. Avec l’instauration d’une taxation des transactions financières et la suppression de la TVA pour les produits de première nécessité, nous proposons donc un panel d’instruments fiscaux redonnant toute leur place à l’impôt progressif et à la solidarité nationale. Ces instruments doivent permettre de réduire très nettement les inégalités économiques et de satisfaire aux besoins collectifs que représentent, par exemple, un véritable service public de l’habitat, de la petite enfance ou de l’aide aux personnes dépendantes. | Marie-George Buffet « Les dépenses publiques ne sont pas des coûts pour la société, mais la condition de son développement. » | La réponse de Marie-George Buffet, candidate de la gauche populaire anti-libérale soutenue par le Parti communiste L’appel lancé par la revue Alternatives économiques « Pourquoi nous consentons à l’impôt » réagit à la campagne démagogique, inspirée des recettes ultralibérales, considérant la baisse des impôts et des dépenses publiques et sociales comme l’alpha et l’oméga de toute politique économique. A juste raison, cet appel reconnaît le besoin d’un « niveau élevé de dépenses publiques. Ces dépenses ne sont pas seulement un coût, elles sont aussi un investissement, gage à la fois de justice et de dynamisme ». Pour ces raisons, les signataires de cet appel considèrent que l’impôt sur le revenu et l’impôt de solidarité sur la fortune sont légitimes. Ils estiment également qu’un impôt progressif sur les successions est justifié. Je partage pleinement ce souci, tout en notant que l’appel, à mon avis, sous-estime les ravages engendrés par les marchés (marché du travail avec son chômage de masse et sa précarité galopante, marchés financiers et leurs exigences folles de rentabilité financière, concurrence « libre et non faussée » au cœur de toutes les politiques de privatisation des services publics, marchandisation de tous les domaines de la vie, etc.). Je pense que les défis à relever appellent à aller au-delà de simples corrections. Dans cette perspective, une relance des dépenses publiques et sociales comme une réforme des prélèvements seraient donc nécessaires. Elles devraient, selon moi, viser deux objectifs : la justice et l’efficacité sociale. Ainsi, j’affirme qu’il faut augmenter les dépenses publiques pour la santé, l’éducation, la recherche, la culture, le logement social… Ces dépenses ne sont pas des « coûts » pour la société, mais au contraire la condition de son développement. De plus, utilisées sous le contrôle des citoyens et des élus et parallèlement à une mobilisation nouvelle du crédit, ces dépenses publiques engendreraient plus de croissance, et donc de recettes publiques. Comment financer ? Je propose de rendre l’impôt plus juste, plus incitatif à la croissance de l’emploi et de richesses réelles, plus dissuasif pour les opérations et les placements financiers. Pour les ménages, je propose de réduire la part de la TVA – si injuste – et d’accroître graduellement celle des prélèvements progressifs : impôts sur le revenu et sur la fortune (ISF). Je propose un barème de l’impôt sur le revenu avec 10 tranches et la remontée du taux marginal à 55 %. Les revenus financiers du capital, largement défiscalisés, seraient soumis à l’impôt progressif. Je propose de supprimer le « bouclier fiscal », qui vise à réduire l’ISF, de doubler le taux de celui-ci pour les tranches de patrimoines de 750 000 à 1 200 000 € et de le tripler au-delà. L’impôt sur les sociétés doit être revalorisé par la suppression graduelle des zones franches et des régimes dérogatoires. Son taux serait relevé pour les bénéfices placés sur le marché financier. Pour les bénéfices réinvestis, il serait d’autant plus abaissé que l’investissement programmerait plus d’emplois et de formation. Les actifs financiers des entreprises et des banques seraient assujettis à la taxe professionnelle. Enfin, il serait proposé à nos partenaires européens des mesures communes de lutte contre le dumping fiscal. | Arlette Laguiller « Je suis pour augmenter et rendre fortement progressif l’impôt sur le revenu, et ceci sans plafonnement ni bouclier fiscal. » | La réponse d’Arlette Laguiller, candidate soutenue par Lutte ouvrière Tout en ne partageant pas les considérants de l’appel « Pourquoi nous consentons à l’impôt », j’en approuve la conclusion. Entre bien d’autres choses, contrairement au texte de l’appel, je ne pense pas que « le marché est un facteur de progrès ». Je ne suis pas d’accord non plus avec des affirmations du genre « nos revenus ne proviennent pas seulement de notre talent personnel. Ils ont été acquis par notre travail, mais… ». Bien sûr, il y a la réserve sur le fait que les infrastructures, les innovations, etc., viennent de « générations qui nous ont précédés ». Mais, pour ne prendre que cet exemple d’actualité, je ne vois pas en quoi les dividendes distribués aux actionnaires de Gaz de France, d’un montant en croissance de 62 % pour l’année 2006, seraient, même partiellement, la récompense d’un « talent personnel » quelconque, ni en quoi ils auraient été mérités, « acquis par notre travail ». Les dits actionnaires, comme ceux d’EDF privatisée, ont, en premier lieu, profité de la décision du gouvernement d’ouvrir au privé une grande entreprise nationalisée qui marchait bien, sans qu’ils y soient pour quoi que ce soit. Puis ils ont bénéficié du choix du PDG Jean-François Cirelli – et je reprends la formulation du journal Les Echos – de « donner la priorité aux actionnaires ». Cela dit, tout en exprimant ces désaccords sur les considérants qui m’empêchent de signer l’appel tel qu’il est, je souscris bien volontiers à sa conclusion. Je pense en effet que l’Etat devrait, par le biais des services publics, compenser un tant soit peu les inégalités sociales qui résultent du fonctionnement même de l’économie capitaliste et que les impôts sont nécessaires pour cela. Je partage la volonté de récuser les « baisses de la fiscalité dont la contrepartie serait l’insuffisance des moyens donnés à la protection sociale des plus pauvres, à l’éducation, à la recherche, à la santé, au logement ou encore à l’environnement ». Aussi je suis pour augmenter et rendre fortement progressif l’impôt sur le revenu, et ceci sans plafonnement ni « bouclier fiscal ». Je suis pour augmenter de façon substantielle l’impôt sur les bénéfices des sociétés. Il est anormal que le taux de cette imposition soit largement inférieur à ce qu’il était au temps de De Gaulle ou de Giscard (33 % actuellement au lieu de 50 %). Je suis également pour rendre fortement progressif l’impôt sur les successions. En revanche, les impôts indirects (TVA ou TIPP) que les salariés ou les retraités aux revenus les plus modestes et même les SDF payent au même taux que les milliardaires qui, de ce fait, sont particulièrement injustes devraient être fortement diminués sur les articles de consommation courante, voire supprimés et remplacés par la hausse des impôts précédents. | Jean-Marie Le Pen « Nous avons prévu de ne pas remplacer 250 000 postes de fonctionnaires sur les cinq années du mandat. » | La réponse de Jean-Marie Le Pen, candidat soutenu par le Front national Votre pétition fait bien sûr référence aux articles 13 et 14 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789. Je me permets également de vous rappeler les principes énoncés dans l’article 15 : la Société peut demander qu’il lui soit rendu compte du bon usage des deniers publics. Or, votre pétition exprime clairement « que l’Etat doit bien sûr savoir se réformer ». Sur le volet des dépenses Je rejoins en cela la préoccupation que vous avez précédemment énoncée. L’Etat doit profiter du départ en retraite des « baby-boomers » pour recentrer ses activités. Nous avons donc prévu de ne pas remplacer 250 000 postes de fonctionnaires sur les cinq années du mandat : une économie de 8 milliards d’euros. Sur les moyens mêmes des services de l’Etat, nous économiserons 4,5 milliards d’euros et les subventions aux entreprises diminueront de 6 milliards. D’autres économies substantielles seront réalisées au niveau du Budget social (financé – rappelons-le – par l’Etat) : application de la préférence nationale aux prestations sociales par augmentation des cotisations pour les étrangers (gain attendu : 16,3 milliards d’euros) et programme de lutte contre la fraude à la Sécurité sociale (gain attendu : 5 milliards d’euros). L’allègement des charges qui pèsent sur l’Etat a ainsi été calculé au total de 70 milliards. C’est à cette condition qu’un désendettement à terme est possible. Sur le volet des recettes Vous constaterez (pages 41 à 44) que mon programme de gouvernement maintient bel et bien la progressivité de l’impôt, qu’il s’agisse de l’impôt sur le revenu, des droits de succession ou encore de l’impôt sur les sociétés dû par les PME-PMI. Je crois simplement qu’une simplification radicale s’impose par une visibilité des taux marginaux d’imposition. J’ai opté pour le système le plus visible à quatre tranches : 0 %, 10 %, 15 % et 20 %. Il s’agit ici de conférer au barème un caractère incitatif, maximisant l’effet de levier du dynamisme économique. Concernant l’impôt sur le revenu, il diminuera de 50 % en cinq ans, en commençant par les tranches les plus basses. C’est donc 25 milliards de pertes de produit fiscal qui sont attendus mais contrebalancés par des recettes fiscales induites de 9 milliards, selon nos hypothèses, sachant que le taux d’impôt sur les sociétés est ramené, dans le même temps, de 33 % à 20 % au maximum pour les PME. L’ensemble de nos mesures d’allègements fiscaux et de mesures importantes en faveur de la création, du développement des PME – seules créatrices d’emplois – doivent permettre d’opérer une relance par l’offre (soit + 5 % du PIB au bout de cinq ans). En conclusion, je vous rappelle la position constante du Conseil constitutionnel quant au caractère équitable de l’impôt. La juridiction de la Rue Montpensier estime en effet que la proportionnalité d’un impôt est en soi aussi équitable que sa progressivité ; et que c’est au législateur qu’il appartient d’opter entre ces deux voies. Or, en parcourant la liste des signataires de votre appel, j’ai noté les noms d’ardents zélateurs de l’intégration européenne. Vous n’êtes pourtant pas sans savoir que tous les impôts européens sont proportionnels ; et que l’Europe est devenue synonyme de dumping fiscal avec certains Etats prédateurs qui encouragent les délocalisations hors de France, en instaurant des flat taxes à des taux ridiculement bas… | Ségolène Royal « L’ordre juste, c’est un équilibre entre une fiscalité progressive et une dépense plus efficace. » | La réponse de Ségolène Royal, candidate soutenue par le Parti socialiste, le MRC et les Radicaux de gauche L’impôt progressif est l’un des piliers de notre modèle social et économique. Les travaux des économistes, je pense notamment à ceux de Thomas Piketty, ont montré que c’est grâce à l’impôt sur le revenu que les inégalités ont été contenues dans notre pays au cours du XXe siècle, notamment parce qu’il a évité une reconcentration du capital au lendemain de la Première Guerre mondiale. Or, aujourd’hui, cette situation est menacée, car notre fiscalité n’est que très marginalement progressive. La CSG est strictement proportionnelle et son poids est considérable au sein des prélèvements obligatoires, puisqu’elle représente 61 milliards d’euros contre 58 pour l’impôt sur le revenu. D’autres impôts, comme la TVA, ne prennent pas en compte les revenus et ont parfois des effets dégressifs. La TVA frappe particulièrement les ménages à faibles revenus. La taxe d’habitation est fixée de manière forfaitaire sur des bases cadastrales datées : un ménage paye plus s’il habite en banlieue un immeuble construit dans les années 60 que s’il occupe un appartement cossu en centre-ville. Par ailleurs, en cette période préélectorale, le gouvernement a procédé à des allègements massifs d’impôts sur le revenu, dont les effets se font particulièrement sentir cette année. Enfin, le bouclier fiscal conduit à limiter drastiquement les effets redistributifs de l’impôt sur le revenu, en plafonnant le montant de l’impôt dû. C’est d’ailleurs une mise en cause déguisée de l’ISF, compte tenu des caractéristiques des foyers concernés : la réforme bénéficie pour l’essentiel à 16 000 d’entre eux, pour lesquels elle se traduit par une baisse moyenne d’impôt de 22 000 €, soit environ vingt fois le Smic. Je n’aime pas cette expression de « bouclier » qui laisse à penser qu’il faudrait se « protéger » de l’impôt. La dépense publique, financée par l’impôt, ce sont des services publics, des investissements pour l’avenir, dont chacun profite. En revanche, il est légitime d’être très exigeant vis-à-vis de l’argent public et d’œuvrer à une dépense plus efficace, autour de priorités mieux définies, qui commencent par l’école, la recherche, la formation continue. L’ordre juste, c’est un équilibre entre une fiscalité progressive et une dépense plus efficace. Un euro dépensé doit être un euro utile. Mon projet n’est pas d’augmenter les prélèvements obligatoires, il est de les rééquilibrer, pour mieux valoriser le travail et l’initiative, et lutter contre l’économie de la rente que la droite nous promet. Je m’oppose à toute réduction des droits de succession et je reviendrai sur le bouclier fiscal, si je suis élue. Il faut aussi s’attaquer aux niches fiscales, qui permettent à ceux qui sont les mieux informés de bénéficier d’allègements d’impôts en tous genres, sans que cela favorise réellement l’activité économique. | Nicolas Sarkozy « L’un de mes objectifs, sera de réduire les prélèvements obligatoires, en particulier ceux qui pèsent sur le travail. » | La réponse de Nicolas Sarkozy, candidat soutenu par l’UMP La Déclaration des droits de l’homme de 1789 dit que l’impôt est indispensable. Mais elle dit aussi qu’il n’est justifié que lorsqu’il est nécessaire, que tous les citoyens ont le droit de vérifier qu’il est bien employé et qu’il doit être également réparti entre tous, selon leurs facultés. Le civisme fiscal, c’est dire cela. C’est donc le contraire de la contestation systématique, mais aussi de l’acceptation aveugle des prélèvements obligatoires. Cette idée simple est à la base de mon programme et je crois que, sur ce terrain comme sur d’autres, il faut se garder de toute caricature et préférer le bon sens aux partis pris purement idéologiques. Les prélèvements obligatoires sont évidemment légitimes pour financer la santé, l’éducation, la protection sociale, la police, la justice, etc. J’ai pris, dans ces domaines, des engagements précis. J’observe qu’ils sont financés. Les prélèvements obligatoires sont également nécessaires pour corriger les déséquilibres du marché et prendre en compte, par exemple, les objectifs de santé publique ou de protection de l’environnement. Cela non plus, je n’ai jamais hésité à le dire et à en tirer des conséquences concrètes. C’est ce que je fais, par exemple, en proposant de créer une taxe sur le carbone importé, afin d’inciter les pays qui n’ont pas pris d’engagements de réduction des gaz à effet de serre à le faire, en proposant de retenir une TVA à taux réduit pour tous les produits et services écologiques, et en indiquant que je porterai la fiscalité écologique de 2,9 % à 5 % du PIB. Pour autant, notre système fiscal est-il parfait ? Contrairement aux signataires du manifeste, je considère que poser cette question n’est ni démagogique ni « consternant », au contraire. Bien sûr, on peut et on doit être fier de payer ses impôts quand on en a les moyens. C’est mon cas, c’est le cas des principaux candidats à l’élection présidentielle et c’est aussi celui d’un certain nombre de signataires du manifeste. Mais c’est un fait que les citoyens et les entreprises françaises sont soumis à des impôts plus élevés que presque partout ailleurs en Europe et dans le monde. Or, sur qui pèsent le plus ces impôts ? Pas sur ceux qui ont signé le manifeste. Arrêtons l’hypocrisie ! Les cotisations sociales, la CSG et la CRDS, la TVA, la taxe d’habitation et la TIPP, qui sont des impôts qui pèsent sur tous les Français, et donc surtout sur ceux qui sont les moins aisés, représentent 66 % du total des prélèvements obligatoires en France, quand l’impôt sur le revenu en représente 7 % et l’impôt sur les successions et les donations 1,2 %. Voilà pourquoi je redis, sans aucun complexe et sans aucune hésitation, que l’un de mes objectifs, si je suis élu président de la République, sera de réduire les prélèvements obligatoires, en particulier ceux qui pèsent sur le travail, d’en ramener le taux (44,4 % actuellement) à celui de la moyenne de l’Union européenne à 15 (40 %) et de rendre pas moins de 68 milliards d’euros aux Français, soit 2 500 euros par famille. Au surplus, malgré un haut niveau de prélèvements obligatoires, notre dette publique est-elle moins élevée qu’ailleurs ? Les retraités français sont-ils mieux traités que les retraités belges ou néerlandais ? Notre système de santé parvient-il à éviter que les inégalités se creusent ? Notre « stock d’innovations, de savoir-faire, de goût d’entreprendre » – pour reprendre les termes du manifeste – est-il vraiment plus important que celui de l’Allemagne, qui est aujourd’hui le premier exportateur mondial de biens alors que nous perdons des parts de marché ? Je suis convaincu que la France dispose d’atouts immenses et que l’un des premiers devoirs de celui qui présidera dans quelques semaines aux destinées de ce pays sera de faire en sorte que l’énergie, la capacité d’initiative, la créativité et l’esprit d’entreprise des Français puissent s’exprimer librement. Mais ma conviction, c’est que la baisse des prélèvements obligatoires, vu le contexte français, est précisément ce qu’il nous faut pour aller en ce sens. Car, puisque les auteurs du manifeste parlent de ce qu’on fait avec les impôts, parlons aussi de ce que l’on fera en les réduisant. Premièrement, encourager l’investissement, et donc la création d’emplois et la baisse du chômage. Deuxièmement, augmenter le pouvoir d’achat, donc la consommation, qui est un moteur essentiel de la croissance, ainsi que l’épargne, qui est la condition de l’accession de chacun à la propriété de son logement. Troisièmement, valoriser le travail, une urgence dans notre pays, en garantissant à chacun que son courage est justement rémunéré. Et c’est pourquoi je m’inscris à cet égard vigoureusement en faux contre ceux qui considèrent que la suppression de l’impôt sur les successions pour 95 % des ménages est une mesure en faveur de la rente. Qualifier de rentiers toutes ces familles qui n’ont fait que travailler toute leur vie, payer des impôts sur leurs revenus, et dont le seul tort est de préférer laisser quelque chose à leurs enfants plutôt que de consommer eux-mêmes, est tout simplement injuste et insultant. | Dominique Voynet « Taxer différemment les entreprises selon leurs comportements sociaux et environne-mentaux. » | La réponse de Dominique Voynet, candidate soutenue par les Verts Je vous remercie d’avoir pris l’initiative de la pétition pour le civisme fiscal, que j’ai signée dès le premier jour. Je crois d’ailleurs être la seule candidate à l’élection présidentielle à l’avoir fait ! Je suis en effet tout à fait opposée aux baisses d’impôt des plus favorisés d’entre nous, engagées par le gouvernement Jospin en l’an 2000 et largement amplifiées par les gouvernements de Jean-Pierre Raffarin et Dominique de Villepin depuis 2002. Ces baisses sont injustes : 50 % des baisses d’impôt sur le revenu réalisées depuis 2002 ont profité à 3 % des Français ! Le bouclier fiscal instauré récemment revient à vider l’ISF de sa substance. Privé de ces recettes, l’Etat a délégué aux collectivités locales des compétences supplémentaires, comme la gestion du RMI, sans leur donner les moyens afférents. Résultat : les collectivités locales ont augmenté leurs propres impôts qui, le plus souvent, ne tiennent pas compte du revenu. Ainsi, les impôts des classes populaires ont augmenté quand ceux des plus riches ont baissé ! Mais ces baisses sont également inefficaces : la baisse de l’impôt sur le revenu a privé l’Etat de 50 milliards d’euros de recettes depuis 2002, qui manquent cruellement pour réaliser les investissements publics indispensables à la conversion écologique de l’économie. Qui oserait nier qu’elle est absolument indispensable pour faire face aux crises écologiques majeures que sont le changement climatique et la fin du pétrole bon marché. Pour réintroduire de la justice et mettre davantage d’efficacité sociale et environnementale dans notre système fiscal je propose les mesures suivantes : revenir sur l’ensemble des baisses d’impôt sur le revenu accordées depuis l’an 2000 et supprimer les niches fiscales n’ayant aucun intérêt environnemental (soit presque toutes !) ; accroître la progressivité de la CSG en fonction du revenu, que celui-ci soit procuré par des salaires, par des dividendes ou des intérêts financiers. Cette progressivité accrue sur les impôts payés par les personnes physiques doit se doubler d’une réforme de l’imposition des entreprises. L’objectif principal sera de taxer différemment les entreprises selon leurs comportements sociaux et environnementaux. Il n’est pas normal qu’une entreprise qui rémunère correctement ses salariés, qui fait vivre la vie syndicale en interne, qui réduit son impact environnemental… paie autant d’impôts et de cotisations sociales que sa concurrente qui s’en moque. Nous souhaitons mettre en place quelques indicateurs simples pour évaluer la qualité sociale et environnementale des politiques menées par les entreprises, diminuer l’impôt de celles qui jouent le jeu et, en contrepartie, augmenter l’impôt des autres. Enfin, nous souhaitons que la France soit à la pointe du combat pour l’harmonisation fiscale en Europe, notamment en ce qui concerne l’impôt sur les sociétés et l’impôt sur le capital. Je me permets quand même de signaler que la phrase de la pétition indiquant que « Le marché est facteur de progrès parce qu’il permet à l’esprit d’entreprise de s’exprimer » pose problème. Car le marché est également générateur de destructions environnementales et de coûts sociaux non directement mentionnés dans la pétition. Ce qui est facteur de progrès à mes yeux, c’est une économie plurielle, où le marché côtoie une économie publique et un secteur puissant et organisé d’économie sociale et solidaire. |
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